par Christophe Comentale
Avec le réchauffement climatique et ses conséquences diverses, la flore subit depuis plusieurs décennies des modifications importantes. Lors des visites à l’atelier d’Octon, dans l’Hérault, lieu où créent et travaillent les deux protagonistes des éditions Verdigris, Mark Lintott, typographe, compositeur et relieur et Judith Rothchild, pastelliste et graveuse en manière noire, j’ai eu l’occasion d’observer et d’apprécier la flore et ses développements exubérants. Cela ne vise pas directement les cultures, vigne, olivier, figuier de Barbarie, mais plutôt une plante dite succulente, l’agave.
Commune sur tout le pourtour de la Méditerranée, elle s’installe là où le climat est plutôt chaud et sec et lui permet ainsi de proliférer, en particulier sur les terrains bien drainés, voire sur les bords de routes, où lorsque la plante est en fin de vie, elle dresse une hampe de plusieurs mètres de haut. Lors de la floraison, qui indique cette fin de vie de la plante, sous le poids des plantules apparaissant aux emplacements des fleurs, la hampe tombe, permettant aux plantules de s’enraciner au contact du sol. Parallèlement, sur un diamètre d’un à deux mètres, des plantes apparaissent autour du pied mère.
Octon ne déroge pas à la règle, et, autour des hauteurs qui se succèdent entre Montpellier et ce village, des agaves forment comme des taches, des masses découpées et vertes ou davantage bariolées lorsqu’elles sont panachées et bordées de zones d’un jaune variable.
Manière noire et éléments végétaux
Apparue au 17e siècle, cette technique a, comme toutes les façons de créer, de produire des images, dû faire l’objet d’essais plus ou moins réussis avant que soit trouvée une définition acceptée du processus qui permet de donner ombre et lumière aux œuvres.
Les graveurs en manière noire ont laissé à la postérité des œuvres remarquables. Pour le 18e siècle, Valentine Green (1739-1813) talentueux graveur, meurt ruiné, il laisse près de 400 manières noires, des compositions où le détail fait passer plutôt agréablement des descriptions historiques très édifiantes, Le courant romantique qui parcourt le 19e siècle en parallèle aux atrocités et disettes sociales diverses, permet à Thomas Lewis Atkinson de produire, comme nombre de ses confrères, des œuvres d’interprétation, telle cette Flora (1876), la divinité est entourée d’une surabondance de fleurs digne des descriptions à venir de Zola dans La faute de l’abbé Mouret !
Outre l’œuvre de John Martin (1789, Haydon Bridge – 1854, île de Man), on se doit de mentionner le travail de Richard Earlom (1743, Londres – 1822) qui n’hésite pas, notamment dans sa série du Liber veritatis, dont il existe plusieurs éditions entre 1776 et 1802 à mêler manière noire et eau-forte. Il sait aussi traduire un faste et une abondance dignes des Flamands, comme avec A fruit piece, une manière noire qui montre toutes les ressources du sombre et du clair. Ce qu’avait noté Diderot dans ses Essais sur la peinture pour faire suite au Salon de 1765 : « Dans la gravure noire, la nuit est profonde : le travail fait poindre le jour dans cette nuit ».

Richard Earlom (1743-1822), A fruit piece. Gravure à la manière noire, 31,2 x 35,6 cm, éditée par J.Boydell. Épreuve doublée, pliure cassée horizontale dans le bas, petits manques dans les bords.
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