par Christophe Comentale
La découverte récente sur le marché de l’art d’une série de cinq œuvres de Zhang Hua sur le thème du poisson chez un artiste connu pour ses représentations de personnages d’une part et de l’autre pour une impressionnante production d’œuvres polychromes abstraites nées de l’observation des mutations urbaines durant le séjour new-yorkais amène à réfléchir sur la place de ce dragon d’eau dans la culture et dans l’œuvre d’un peintre non conformiste.


A SURPRISING THEME IN ZHANG HUA’S WORK, THE CHINESE CARP
by Christophe Comentale
The recent discovery on the art market of a series of five works by Zhang Hua on the theme of fish by an artist known for his representations of characters on the one hand and for an impressive production of abstract polychrome works born from the observation of urban changes during his stay in New York on the other leads us to reflect on the place of this water dragon in the culture and in the work of a non-conformist painter.
张华作品中一个令人惊讶的主题,中国鲤鱼
作者 Christophe Comentale (柯孟德)
最近在艺术市场上发现了张华以鱼为主题的五件系列作品,一方面是这位以表现人物而闻名的艺术家,另一方面是他在纽约逗留期间因观察城市变化而诞生的令人印象深刻的抽象彩色作品,这让我们反思这条水龙在文化和一个不墨守成规的画家的作品。
QUELQUES REMARQUES SUR LA CARPE, POISSON POPULAIRE EN CHINE
Pourquoi le thème du poisson, plus exactement de la carpe, dans l’œuvre de Zhang Hua ?
« La dénomination de carpes de Chine concerne trois espèces de Cyprinidés : la carpe Amour ou Amour blanc (car originaire du fleuve Amour) ou carpe herbivore (Ctenopharyngodon idella), la carpe argentée (hypophthalmichthys mollitrix), la carpe marbrée ou carpe à grosse tête (Aristichthys nobilis) » lit-on dans le Règlement (CE) n° 708/2007 du Conseil du 11 juin 2007 de la Fédération française d’aquaculture. Il est dit aussi que ces carpes « ont été introduites en Europe centrale puis en France à partir de 1960 (…). En outre, un décret sur les eaux, en particulier les eaux closes, a abouti à interdire désormais, sous peine d’une amende de 9000 euros, la présence de ces trois espèces dans les piscicultures et les eaux closes (…). Les pisciculteurs et les clients de ces mêmes pisciculteurs doivent également solliciter leur préfet afin d’obtenir une autorisation pour empoissonner leurs plans d’eau avec ces espèces ! ». Ces éléments disparates renvoient à une appellation plus connue, celle de la carpe koï. Le terme japonais « koï » (鯉 ou li en chinois) signifie simplement carpe. Les carpes dont la couleur a été modifié par une évolution génétique particulière sont appréciées, plus essentiellement pour leur chair mais pour leur aspect ornemental, d’où la terminologie japonaise de nishiki-goi (錦鯉, littéralement « carpe de brocart »), des termes dérivés du chinois si l’on se réfère aux caractères employés. jǐnlǐ ( 锦鲤 ou en graphie non simplifiée 錦鯉 ).
La carpe koï n’est pas originaire du Japon. C’est en Chine qu’apparaissent les premiers écrits les concernant vers 500 av. J.-C. La carpe koï est introduite au Japon lors des invasions chinoises qui ont intensifié la sinisation de cette culture. Les premières techniques d’élevage de cette carpe ont également été mises en place en Chine, essentiellement pour la saveur de la chair de ce poisson. Les variations chromatiques se limitaient alors au rouge et au gris. Les premières mutations chromatiques remarquables apparaissent entre 1804 et 1830 et concernent les carpes rouges, blanches et jaunes. Entre 1830 et 1850, les variantes polychromes se dessinent à la suite d’un croisement entre une carpe blanche et une carpe rouge. Dès la fin du XIXe siècle, la plupart des variétés actuelles sont reconnues. Pour les stabiliser comme nous les connaissons actuellement il faut attendre le XXe siècle. Selon une des nombreuses légendes chinoises relatives à ce poisson, les carpes du fleuve Jaune, après avoir remonté le fleuve, s’envoleraient vers le ciel en se transformant en dragons. Les couleurs éclatantes et le corps élégant des poissons Koï symbolisent la richesse et l’opulence, tout comme un homophone du mot poisson en chinois signifie abondance.

ZHANG HUA, PEINTRE DE L’ECOLE DE PARIS
Lors de précédentes livraisons d’articles sur ce site, nous avons présenté succinctement Zhang Hua (1898-1970), artiste dont l’œuvre compte plusieurs centaines de peintures, de dessins et d’œuvres sur des supports autres, en particulier sur des pièces de mobilier, des mannequins de couturière ou des instruments de musique.
De même que différents artistes de cette Ecole de Paris, comme Roger Bertin qui séjourne au sud de la Chine a intégré dans son œuvre une approche calligraphique (ill. 3), Zhang Hua a adopté une polychromie dont les drippings et les taches, traces et autres éléments graphiques structurent son œuvre au fil de décennies d’une création intense (ill. 4, 5 et 6).


Ci-dessus, de gauche à droite. Zhang Hua. (ill. 5) Abstraction sur fond orange, huile sur papier, 33 x 41 cm ; (ill. 6) Zhang Hua, sans titre, signé non daté, gouache sur papier, 32 x 21 cm
Zhang Hua a laissé plus d’une vingtaine d’autoportraits de lui, de même qu’il semble bien s’être intégré dans sa société d’accueil, il se représente fréquemment avec des amis, en particulier des amis artistes (ill. 7). Ses personnages, hommes, femmes, sont aussi dépeints dans l’intimité de l’atelier, il se révèle surprenant tant sur la forme que sur le fond. Il a voisiné avec des artistes désormais reconnus pour leur originalité thématique comme stylistique, ainsi, il loge dans le même endroit que sa consoeur Pan Yuliang (1895-1977), tous deux peignent des sujets identiques, tout en leur conférant une identité propre. Sa force créative a été comparée à celle de Louise Bourgeois (ill. 8), plus éparpillée mais tout aussi entreprenante sur des sujets variés.
FOCUS SUR LA SERIE DE POISSONS PEINTE PAR ZHANG HUA
DURANT LES ANNEES 50-60
Cette série de poissons connue à ce jour comprend deux huiles sur toile (ill. 1et 2) trois œuvres polychromes dessinées au crayon de couleur (ill. 9, 10 et 11). Les deux huiles sur toile traduisent la force d’observation de l’artiste qui a adopté pour la circonstance une palette assez proche de celle que l’on retrouve au fil des créations produite à Vallauris durant plusieurs décennies, notamment les verts et les rouges. De même, les trois dessins sont trois feuilles d’album de dimensions identiques (24 cm sur 32 cm), un format courant pour les feuilles d’études que les artistes français utilisent. Parisien, Zhang Hua a eu toute latitude pour admirer les poissons exotiques vendus sur les quais de la Seine et qui, durant plusieurs décennies, en particulier des années 1960 à 2000 ont eu un énorme succès populaire.



Ci-dessus, de gauche à droite. (ill. 9) Zhang Hua, Queues de voile, crayons de coul. 24 x 32 cm ; (ill. 10) Zhang Hua, Beta pugnax, crayons de coul. 24 x 32 cm ; (ill. 11) Zhang Hua, Guppies, crayons de coul. 24 x 32 cm
Il n’empêche que cet artiste savant n’oublie pas que le poisson est et reste un symbole fort pour toute l’Asie sinisée, ce cyprinidé sait remonter des courants contraires afin de trouver les eaux propices à une vie d’abondance …
与中国鲤鱼有关的历史部分的段落没有翻译。大量数据以中文提供
张华,巴黎画派画家
在本网站的前几期文章中,我们简要介绍了张华(1898-1970),这位艺术家的作品包括数百幅绘画、素描和其他媒体作品,特别是家具、裁缝的人体模型或乐器。就像这个巴黎学派的许多艺术家,如生活在中国南方的罗杰·贝尔坦(Roger Bertin)将书法方法融入他的作品中一样,张华采用了一种多色,其滴落和污渍、痕迹和其他图形元素构成了他几十年来紧张创作的作品(参见插图)。张华留下了二十多幅自己的自画像,就像他似乎已经很好地融入了他的东道国社会一样,他经常与朋友,尤其是艺术家朋友(参见插图)一起描绘自己。他的人物,男人和女人,也被描绘在工作室的亲密关系中,在形式和内容上都令人惊讶。他与现在以其主题和风格独创性而闻名的艺术家擦肩而过,因此他与他的同事潘玉良(1895-1977 年)住在同一个地方,他们都画相同的主题,同时赋予他们自己的身份。她的创作能力被拿来与路易丝·布尔乔亚(Louise Bourgeois)相提并论,后者更分散,但在各种主题上同样具有进取心。
聚焦张华绘制的鱼系列
在 50 年代和 60 年代
这一系列鱼是迄今为止已知的,包括两幅布面油画和三幅用彩色铅笔绘制的彩色作品。这两幅布面油画反映了艺术家的观察力,他为这个场合采用了非常接近几十年来在瓦洛里斯创作的调色板,尤其是绿色和红色。同样,这三幅图画是三张尺寸相同(24 厘米 x 32 厘米)的相册页,这是法国艺术家使用的学习页的常见格式。作为巴黎人,张华有充分的自由来欣赏塞纳河畔出售的异国情调的鱼,几十年来,特别是从 1960 年代到 2000 年代,这些鱼取得了巨大的成功。
ZHANG HUA, PAINTER OF THE SCHOOL OF PARIS
In previous issues of articles on this site, we have briefly presented Zhang Hua (1898-1970), an artist whose work includes several hundred paintings, drawings and works on other media, in particular on pieces of furniture, dressmaker’s mannequins or musical instruments. In the same way that various artists of this School of Paris, such as Roger Bertin, who lived in southern China, integrated a calligraphic approach into his work (ill), Zhang Hua adopted a polychromy whose drippings and stains, traces and other graphic elements structure his work over decades of intense creation (ill). Zhang Hua left more than twenty self-portraits of himself, just as he seems to have integrated well into his host society, he frequently depicts himself with friends, especially artist friends (ill). His characters, men and women, are also depicted in the intimacy of the studio, it is surprising both in form and content. He rubbed shoulders with artists now recognized for their thematic and stylistic originality, so he lived in the same place as his colleague Pan Yuliang (1895-1977), both of whom painted identical subjects, while giving them their own identity. Her creative strength has been compared to that of Louise Bourgeois, who is more scattered but just as enterprising on various subjects.
FOCUS ON THE FISH SERIES PAINTED BY ZHANG HUA
DURING THE 50S AND 60S
This series of fish, known to date, includes two oils on canvas and three polychrome works drawn in coloured pencil. The two oils on canvas reflect the artist’s power of observation, who adopted a palette for the occasion quite close to that found in the creations produced in Vallauris over several decades, particularly greens and reds. Similarly, the three drawings are three album sheets of identical dimensions (24 cm by 32 cm), a common format for the study sheets used by French artists. A Parisian, Zhang Hua had full latitude to admire the exotic fish sold on the banks of the Seine and which, for several decades, in particular from the 1960s to the 2000s, were a huge popular success.
REPÈRES BIBLIOGRAPHIQUES
- Alain Cardenas-Castro et Christophe Comentale, Zhang Hua 張華 (1898-1970). Figurations et abstraction calligraphique Version en ligne, S&AC, publiée le 3 octobre 2023
- Alain Cardenas-Castro et Christophe Comentale, Sylvie Vervaet, quand la permanence des images mène aux collections. Parcours d’une marchande d’art érudite. in Sciences et art contemporain, sept. 2023.
- Brigitte Camus, Zhang Hua, Un jeu de piste jubilatoire. Paris : chez l’autrice, 2020 (inédit)
- Christophe Comentale, Découverte d’un portrait de Kees van Dongen par Zhang Hua. Version en ligne, S&AC, publié le 27 avril 2024.
- Christophe Comentale, Cent ans d’art en Chine. Paris : Editions du Canoë, 2023. 540 p. : environ 600 ill. Bibliog. Index.[à paraître fin octobre 2023]. Voir : Zhang Hua張華 Fragments de vie entre yin et yang, pp. 118-119 : ill.
- Christophe Comentale, Jean Cocteau et ses amis artistes étrangers, de Dominique Dalozo à Zhang Hua. Quelques remarques 让·科克 托 (1882-1973)和他的朋友作为外国艺术家,从多米尼克·达洛佐到张华 Jean Cocteau and his friends as foreign artists, from Dominique Dalozo to Zhang Hua. A few remarks Version en ligne, S&AC, publié le 1er avril 2025
- Thomas Krens, Rendez-vous, chefs-d’œuvre du Centre Georges-Pompidou et du Guggenheim Museum. Paris : Ed. du centre Pompidou, 1998.
- Li Shizeng [notice biographique] Li Shizeng 李石曾 par Choi Hak-kin, François Godement et Yves Chevrier, https://maitron.fr. Version mise en ligne le 8 novembre 2016, dernière modification le 8 novembre 2016.
- Jackson Pollock. les premières années (1934-1947). Paris : musée Picasso, 2025
- Jacques Rigaud, Pour une refondation de la politique culturelle, Paris, La Documentation française, 1996
- Yu-Sion Live, Les Chinois de Paris depuis le début du siècle. Présence urbaine et activités économiques, in La diaspora Chinoise en occident, Revue Européenne des Migrations Internationales, 1992, n°83 pp. 155-173.